Parler d’éducation affective et sexuelle à nos propres enfants est un exercice difficile.
J’en discute régulièrement avec des groupes de parents. Tous avouent être embarrassés face aux questions de leurs enfants, même ceux qui croyaient être à l’aise avec ce sujet, même ceux qui sont bien informés.
J’y vois plusieurs raisons.
La première raison est que ce questionnement nous renvoie à notre propre questionnement d’enfant ou d’adolescent, et surtout aux réponses que nous avons reçues, ou pas, et à la sérénité ou au contraire la gêne perçues par nous à ces moments-là.
La deuxième est que ce sujet touche à l’intimité du couple parental. Une pudeur tout à fait justifiée retient le parent. Car la frontière n’est pas évidente entre information à apporter à l’enfant et confidence sur la sexualité parentale qui ne le concerne pas et ne doit pas être dite.
La troisième est que le parent est souvent désemparé par les questions de l’enfant. Il se heurte à une double difficulté : comment formuler la réponse (le savoir, les mots à utiliser, la part de réalisme et de poésie, de mystère même) et jusqu’où aller dans la réponse. Si l’enfant demande une réponse précise, il n’attend pas forcément toute la réponse anatomique et physiologique. Souvent les parents en disent trop ou trop peu … quand ils ne bottent pas en touche : « Tu es trop petit … je t’expliquerai plus tard … ». Le risque encouru est ici que l’enfant aille chercher et trouve une réponse ailleurs, réponse qui précisément ne sera peut-être pas celle souhaitée par les parents.
La quatrième difficulté est la méconnaissance de ce que sait déjà l’enfant. En effet les parents commencent à prendre conscience que leur enfant a accès à des informations en dehors du cercle familial. Si la cour de récréation ou les confidences des camarades ont toujours été « instructives », la déferlante de l’érotisme et de la pornographie, par le canal d’internet (ordinateurs ou téléphones mobiles), atteint aujourd’hui tous nos enfants, aussi protégés soient-ils. Les informations ou images qu’ils peuvent recevoir ne sont pas délicates, ni respectueuses, souvent inexactes, et donnent une image très faussée de l’amour.
En tant qu’éducatrice à la vie affective et sexuelle, j’interviens dans des établissements scolaires, dès le CM2. Je peux témoigner des questions posées par les enfants et des connaissances qu’ils ont. C’est parfois ahurissant et inquiétant. Quand 50 à 70% d’entre eux (selon l’âge et le sexe) avouent qu’à la maison le sujet est tabou, et qu’ils ne peuvent ou n’osent pas poser les questions qui les intéressent ou les tracassent, je dis qu’il y a urgence à sensibiliser les parents sur leur rôle d’éducateurs dans ce domaine.
Puisque parler d’éducation affective et sexuelle à nos enfants reste un exercice difficile, je recommande aux parents qui le souhaitent de s’appuyer sur un livre ou un DVD d’éducation sexuelle. Ils pourront, soit le regarder avec leur enfant, soit le glisser sur sa table de nuit. Il en existe de très bien faits, comme ce livre que j’apprécie beaucoup, car précis et joliment illustré :
« C’est quoi l’amour ? » de Marie Pasquier, aux éditions Quasar. Voilà un livre qui donne tout son sens à la sexualité humaine en la rendant indissociable de l’amour.